LA FOI


Par Bertrand Souchard
Enseignement du 21/11/2007

La foi est la réponse à la révélation. La foi est une certitude mais c'est suspect à une époque où chacun croit en ce qu'il veut.

1. La foi est un acte d'intelligence sur un contenu étonnant

La foi est-elle un sentiment confus? Une perception interne? Ce qui revient a en faire quelque chose de relatif
Objection: c'est un acte intérieur sur un contenu étonnant et précis. La foi repose sur le credo qui existe depuis plus de 2000 ans.
La foi n'est pas la mienne mais celle de l'Eglise. cf prière eucharistique: "Ne regarde pas nos péchés mais la foi de ton Eglise."
La foi s'appuie sur quelque chose d'objectif discerné à un moment de l'histoire
Le contenu en est précis. La foi chrétienne a des particularités :
- seule religion ou Jésus est Dieu fait homme
- seul Dieu humilié dans l'histoire, par la croix
- la résurrection d'entre les morts
Ce contenu est tellement étonnant qu'il est incroyable:
- pour les juifs, l'incarnation est un blasphème
- cf les disciples d'Emmaüs pour la résurrection
La foi interpelle objectivement mon intelligence.

2. La foi n'est pas évidente mais certaine

L'évidence est objective. Evidence vient du latin "video" qui signifie je vois.
La certitude est subjective. C'est un acte personnel.
La foi n'est pas évidente. Personne n'a jamais vu Dieu, même pour ceux qui ont fait une expérience mystique: ils ont vue Jésus, Marie mais jamais Dieu le Père. La foi est certaine car il s'agit d'un acte de décision de ma volonté. Je suis entraîné par quelque chose qui me dépasse. "Cherchez et vous trouverez." La foi est donc un acte de ma liberté qui me donne d'aller plus loin.
A contrario
Pour l'athéiste: "ce n'est pas évident ce n'est pas certain"
Le fondamentaliste "puisque c'est certain, c'est évident."
Cf prière eucharistique: "Il est grand le mystère de la foi." Ce n'est jamais fini. On ne s'ennuiera pas au Ciel, on aura l'éternité.

3. Relation - adhésion exigeante à une personne.

Pour Freud, la foi est une manière de se rassurer.
Pour Nietzsche, c'est une invention des faibles, un ressentiment, c'est à dire une vengeance imaginaire.
Mais la foi n'est pas de tout repos car elle est exigeante:
être fidèle à la prière
être fidèle à la charité
en 20 siècles, 27 millions de martyrs
Etre chrétien, c'est être témoin et il faut du courage. Le christianisme n'est pas un ensemble de valeur, mais c'est l'adhésion à une personne, Jésus qui est "le chemin, la vérité et la vie." Il me fait comprendre que je tire ma force de quelqu'un d'autre.

4. Acte de confiance en des témoins qui vivent ce qu'ils disent

Pourquoi pas Mahomet, Bouddha?
Jésus est le vrai témoin. C'est la seule personne dont les actes sont identiques aux paroles. Le Christ réalise ses paroles. L'Evangile est la réalisation des Béatitudes. Idem pour les saints. Jésus je peux l'aimer car son témoignage est vrai.

5. La foi a trois dimensions

- don de Dieu
- relation
- adhésion
La foi est une vertu théologale, un don de Dieu, parce qu'on crie pour la recevoir. Même dans ce cri, il y a quelque chose du don de Dieu.
La réponse est l'attachement au Christ. Au bout du compte, on adhère à un contenu.
On est petit et humble face à ce don qui nous vient d'ailleurs.

6. Pas de foi sans espérance ni charité

La foi est un des trois vertu théologale (vertu dont Dieu est à l'origine et à la fin). La foi est un acte présent lié au passé. La charité est un acte présent, l'espérance un acte du présent lié au futur. La foi est un acte de la raison, de mon intelligence et de ma volonté. Au Ciel il n'y aura plus la foi. La foi doit s'accompagner de l'espérance et de la charité.
L'espérance sans la foi c'est l'espoir humain: c'est la tentation pélagienne. Cf le siècle des lumières où l'espérance st mis dans la raison humaine.
La foi sans l'espérance, c'est la foi tragique : c'est la tentation protestante. "Je suis écrasé par un Dieu tout puissant."
Il existe donc un lien entre foi et espérance. Mais il existe aussi un lien entre foi et charité.
Les démons ont la foi sans la charité: c'est la foi infinie. La tentation de la foi démoniaque consiste à savoir que Jésus est Sauveur mais à ne pas L'aimer. avoir la foi c'est être dans une relation mendiante auprès de Jésus. "Seigneur augmente en nous la foi." C'est un aveu de faiblesse.

7. Les moyens concrets pour grandir dans la foi

C'est en pratiquant la foi qu'on grandit dans la foi. La foi est donc la pratique de la foi.
a/ Décider de suivre Jésus
Acte de foi
Credo
Notre Père
Poser de petits actes

b/ La foi est transmise par la Parole et interprétée par l'Eglise
Lire la Bible
Lire les textes du dimanche
Lire le catéchisme de l'Eglise catholique
Ecouter les sermons
Il n'y a qu'une seule Parole. Dieu est Parole.
c/ Relation amoureuse
Prière: pas de foi sans vie de prière
Retraites
Pèlerinages
Prier le Notre Père

d/ Les sacrements
Je reçois la foi dans le baptême
Les sacrements du pèlerin: l'Eucharistie et le sacrement de réconciliation
e/ Le témoignage
Grandir dans la foi c'est témoigner de sa foi

f/ Renoncer
La foi nécessite de renoncer à d'autres choses
Cf le Cardinal Barbarin : " Eteindre la télévision et allumer l'Evangile

L'APPEL A LA SAINTETE

par René et Claire de Vaumas
enseignement du 14 novembre 2007
Nous voudrions réfléchir avec vous à la question de la sainteté, de l’appel à la sainteté qui nous est posée : quelle sainteté ? sommes-nous concernés ? à quelle fin et comment ?
Il se trouve que nous sommes au mois de novembre et que nous avons commencé à préparer cet enseignement le lendemain de la Toussaint, fête de tous les saints, donc à la lumière des textes liturgiques de cette grande fête.
La première lecture sera notre point de départ ( Ap 7,9-12 )
Voilà la vision qui nous est livrée et voilà notre espérance : promesse d’une foule innombrable et de toute origine au sein de Dieu, dans la louange.
C’est l’assemblée des saints.

Pour comprendre cette vision et voir comment nous pouvons y accéder, nous allons essayer de définir la sainteté, puis comprendre l’appel qui nous est fait et voir enfin la façon d’y répondre.

Partie 1 Qu’est ce que la sainteté ?

« Maître, que dois-je faire pour avoir accès à la vie éternelle ? » Lc 10, 25
« Maître, tout cela je l’ai observé dès ma jeunesse » Mc 10, 17

Il y a bien des questions et des malentendus sur la notion de sainteté.

Définition de la sainteté d’après les Ecritures:

Nous allons d’abord évoquer ce que signifie la Sainteté dans l’Ecriture.

Le Saint par excellence, évidemment c’est Dieu. L’Ecriture revient souvent, en particulier dans le Livre d’Isaïe, sur le nom : Dieu Saint.

Les mots : kadoch en hébreu, hagios en grec, sanctus en latin, ont une étymologie comparable; ces trois mots ne dérivent pas d’une même racine, mais dans l’évolution de ces langues la conception est comparable : la sainteté c’est le fait d’être séparé, c’est d’être dans un ordre autre que l’ordre commun des choses humaines et du monde qui nous entoure.

La sainteté de Dieu désigne de ce fait que Dieu est vraiment au-delà de tout, et qu’il est le Dieu Unique, Immense, qui dépasse absolument toute chose, qu’Il est infiniment parfait et au delà de tout, non seulement de tout ce qui existe, mais de tout ce qui peut se penser ou se concevoir.

Ainsi la sainteté n’est pas au départ une perfection humaine, plus ou moins ennuyeuse, ardue, une perfection morale ou spirituelle, comme nous le pensons spontanément quand nous parlons de saints canonisables. La Sainteté signifie et désigne d’abord et avant tout le propre de Dieu ou l’appartenance radicale, exclusive, totale, définitive à Dieu.

Où est la sainteté dans l’Ecriture ? :

On pense toujours aux Saints comme des personnes, mais dans l’Ecriture les réalités saintes, ce ne se sont pas d’abord des personnes, mais des réalités consacrées à Dieu.

La première des réalités saintes dont il est fait mention dans l’Ecriture c’est : “Dieu bénit le septième jour et il sanctifia.”(Gn 2,3). Car le septième jour il avait cessé tout son travail de création. C’est la première réalité dont on nous ait dit qu’elle est sainte et sanctifiée.

Ainsi la Loi sur le Sabbat : ce jour appartient au Seigneur, et on ne se comporte pas comme les autres jours, on ne fait pas n’importe quoi (et en particulier, pas son travail habituel). Parce qu’il appartient à Dieu, ce jour est saint, il n’appartient plus au domaine de la création ordinaire et de l’œuvre et de l’activité ordinaires de l’homme.

Deuxième réalité sanctifiée dans l’écriture, c’est un lieu.
Une terre sainte où brûle sans se consumer le buisson ardent. Un lieu terrestre où Dieu se manifeste : (Exode 3,5)

Ensuite ce qui devient saint pour l’Ecriture, lorsque les tables de la Loi sont remises, c’est le Temple ou plus exactement le lieu du temple où réside l’Arche: le Saint des Saints.

Ex 25 : prescription de Dieu concernant l’Arche et sa Tente

Le Saint des Saints, c’est cette salle où réside l’Arche que surmontent les chérubins et qui est vraiment le lieu de la gloire de Dieu et dans lequel, seul le grand prêtre entre une fois par an. Ce lieu est tellement saint que, quand on s’en approche indûment, on en meurt.

Par conséquent, vont devenir saintes toutes les réalités qui seront plus ou moins proches, et en contact avec ce lieu Saint, c’est à dire tous les objets du culte pour les offrandes, pour le service du Temple, pour le sanctuaire etc...

Puis les personnes en contact avec des réalités saintes, les ministres du culte :

Ex 29 : consécration d’Aaron et ses fils

Ce qui sanctifie, ce qui consacre, c’est d’être mis par Dieu dans ce qui relève de Lui. C’est de toucher ce qui appartient au Seigneur et c’est par cela que l’on est consacré. Les objets sont consacrés en tant qu’ils sont mis à part pour Dieu. Les prêtres, eux-mêmes, les Lévites deviendront saints par contact avec ces réalités saintes, c’est à dire ils sont mis complètement à part pour le Seigneur.

Vous pourrez retrouver ou découvrir tout cela dans le Deutéronome ou dans l’Exode:“Tu feras, la consécration de l’autel, pendant sept jours tu feras l’expiation pour l’autel et tu le consacreras, tu le sanctifieras, il sera alors éminemment Saint - (Saint de Saint littéralement) , et tout ce qui touchera à l’autel sera Saint, sera sanctifié, appartiendra au Seigneur....”

Par extension du temps qui est sanctifié, de ce jour de la semaine qui est sanctifié, de ce lieu qui est Saint, on passe à l’autel et aux objets du Temple puis aux prêtres, et enfin tout le peuple de Dieu, qui participe au culte, qui a été mis à part pour Lui, qui a été choisi et marche derrière l’Arche d’alliance.

Lévitique 11/44-45 : Car c’est moi, le Seigneur qui suis votre Dieu, vous avez été sanctifiés et vous êtes devenus Saints parce que je suis Saint.

Toute la Loi, tous les commandements, les différentes réglementations, parfois très minutieuses, c’est tout simplement qu’à partir du moment où on appartient à Dieu, on ne peut plus se comporter n’importe comment, dans son vêtement, dans sa nourriture, dans sa manière de voyager, d’accueillir les étrangers, de travailler, etc... Tout devient ordonné au Seigneur.




Plus tard, dans le Nouveau Testament, selon la même tradition les “saints” désignent les chrétiens.

Dans le N.T., nous trouvons quelque chose d’analogue, qui est en pleine continuité avec la première Alliance. Sur ce point, entre autre, le mot de Saint désigne l’un des termes privilégiés les plus beaux pour désigner les fidèles, les croyants, les chrétiens. Il y a deux termes particulièrement fréquents chez Paul, et dans le N.T. pour désigner les croyants, les chrétiens, c’est le nom de Frères et c’est le nom de Saints. Ce terme de saint, parce que nous avons été sanctifié par le Baptême, vous avez été lavés, vous avez été sanctifiés, vous avez été justifiés par le nom du Seigneur Jésus-Christ et par l’Esprit de notre Dieu , 1 Cor. 6,11. Ce nom de Saint est tellement fort, que dans les traductions actuelles, en particulier liturgiques, on n’ose plus l’employer.

La Sainteté ce n’est donc pas d’abord une perfection morale, elle est l’appartenance au Christ, et le fait d’avoir été sanctifié, mis à part, consacré par le Baptême et par l’Esprit de Sainteté. Devenir des saints, c’est vraiment vivre l’appartenance au peuple choisi et consacré, qui est l’Eglise du Christ.


Partie 2 : Nous sommes appelés à la sainteté.

Alors qui est concerné par la sainteté ?
Une vocation extraordinaire de quelques contemporains de Jésus comme les apôtres ? ou de héros comme Mère Térésa ou Maximilien Kolbe ? ou certains qui semblent s’être retirés du monde comme Thérèse de l’Enfant Jésus ?

a) notre nature est sainte

La Genèse nous donne un première réponse concernant notre véritable nature.
Dieu a fait l’homme à son image. Gn 1,27 . Notre être est donc d’un autre ordre que terrestre et nous sommes donc voués à vivre dans le sein de Dieu, comme à l’origine. C’est ainsi que nous avons été créés, même si le péché nous en a éloigné.
Les prophètes, la Loi ne cessent de nous appeler à retourner à la pureté originelle.
Dieu ne cesse d’inviter son peuple à l’alliance.
C’est un appel universel.

b) exhortation du Seigneur et rédemption

Le Seigneur Jésus s’adresse à tous les hommes et les appelle à la sainteté. Cet appel n’est pas une option, c’est une nécessité et un commandement du Seigneur.
1 Pierre 15 et 16, “ ...à l’exemple du Saint qui vous a appelés, devenez Saints vous aussi, dans toute votre conduite, selon qu’il est écrit : Vous serez Saints parce que je suis Saint....” Nous n’avons pas le choix, c’est un commandement du Seigneur, qui nous dit “Soyez parfaits, comme le Père du Ciel est parfait” ( Mt 5, 48 ) et les deux termes Saints et Parfaits sont très proches.

Si nous écoutons Jésus, si nous sommes touchés par sa personne, nous sommes directement concernés par cet appel.

Et c’est si important pour le Concile Vatican II, qu’il y a un chapitre entier de cette constitution sur l’Eglise, qui est le chapitre 5, qui est intitulé « La vocation universelle à la sainteté dans l’Eglise »
Le Seigneur Jésus, maître et modèle divin de toute perfection, a prêché cette sainteté de la vie, dont lui-même est l’auteur et qu’il conduit à son achèvement, à tous et à chacun de ses disciples quelle que soit sa condition.

Et Jésus, Dieu lui lui-même, ne fait pas que nous exhorter à la sainteté, il nous sauve. Par sa mort et sa résurrection il ouvre l’accès au Ciel à toute l’humanité de façon définitive . Il nous rachète, nous permet d’être saints alors qu’il nous l’est impossible par nos propres forces ou mérites.

c) baptisés, dans le monde actuel, nous ne pouvons pas être des médiocres

Et puis, il y a une troisième raison qui fait que la sainteté n’est pas pour nous baptisés une option ou un appel facultatif, mais vraiment une responsabilité parce que dans le monde dans lequel nous vivons, ni seulement nous n’avons pas le droit, mais nous ne pouvons pas être des médiocres et indifférents à la soif de nos prochains. Le monde actuel est tellement bouleversé, attaqué, affaibli par toutes sortes de choses, déshumanisé, que les chrétiens n’ont qu’une issue, c’est de devenir des Saints, qui servent le monde en bonté et en espérance.

Un jour, un journaliste disait à Mère Térésa :” Cela ne vous gêne pas qu’on dise de vous que vous êtes une Sainte ?”. Elle répondit : ”C’est mon devoir, mais c’est aussi le vôtre“.

Et pourquoi ? pas seulement parce qu’il est moralement bon d’aider les hommes, mais fondamentalement parce que la Sainteté c’est la nature de Dieu et Dieu c’est l’Amour, la Charité. La plénitude de la Sainteté est dans la Charité. Et la Charité c’est objectivement le plus grand besoin du monde et c’est ce qui donne sens à notre vie. Sans la Charité nous ne sommes que des cymbales qui font du bruit.

Eph 1,3-14

Par notre baptême, nous avons été élus et mis à part en vue de la sainteté, en tant que Fils adoptifs du Père. Et nous sommes marqués de l’Esprit Saint. Dans un dessein bienveillant qui concerne toute l’humanité pour la louange de sa gloire.
Nous participons directement à une mission de rédemption de l’humanité toute entière qui aboutira à la vision de l’Apocalypse que nous avons évoquée.
On n’est pas baptisé pour entrer dans un club, mais pour participer à ce dessein.

d) Jésus nous appelle personnellement

Ainsi nous sommes appelés à la sainteté par nature, par exigence de Jésus, par vocation au ciel, par la rédemption, par responsabilité, par notre baptême …
Mais plus personnellement nous sommes invités à faire directement l’expérience de l’appel de Jésus à le suivre.
A la façon de Matthieu (le collabo), de Jean (le disciple du Baptiste), du jeune homme riche, de Nicodème (le pharisien), de Paul (le persécuteur), de la femme adultère (va et ne pèche plus), de Pierre (m’aimes-tu ?), de Zachée (je viens demeurer chez toi)…
Jésus appelle chacun de nous à des instants particuliers de sa vie et nous en donne des signes. C’est très beau de regarder la vie de saints « canonisés » et voir comment Jésus s’est adressé à eux particulièrement : dans une méditation, une rencontre, une révolte, un événement…

Notre évêque dans sa lettre pastorale nous a proposé de méditer la vie du Père Chevrier, bouleversé comme Saint François par la crèche :
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Il peut y avoir aussi des évènements fondateurs qui se prolongent dans toute notre vie, même si nous n’en avons pas pleinement conscience à l’instant.
Lorsque j’avais 12 ans, le jour de ma profession de foi, j’ai prononcé solennellement et en public la phrase suivante : « Je n’admets pas le péché et je m’attache à Jésus Christ pour toujours ». Des années plus tard, cet engagement a continué à résonner dans ma vie, m’a conduit à rester fidèle à Jésus (fidélité à la messe) même dans des périodes où ma vie m’était pas spécialement évangélique et aujourd’hui j’ai accroché au mur de mon bureau sur mon lieu de travail la croix que j’ai reçue le jour de cette profession de foi.

Relisons nos vies, contemplons Jésus, accueillons les appels et les signes qu’il nous envoie hier et aujourd’hui.


Partie 3 - Comment être Saint ?

Donc, nous sommes tous, qui que nous soyons, quel que soit notre état de vie appelés à devenir des Saints.

Plus concrètement comment cela est-il possible ? Comment répondre chacun à cet appel personnel du Seigneur ?

Nous pouvons nous appuyer sur la parabole du Bon Samaritain (Luc 10, 25-37).

Le docteur de la Loi demande : « Maître, que dois-je faire pour avoir la vie éternelle ? »
« Tu aimeras le Seigneur ton Dieu de tout ton cœur, de toute ton âme et de tout ton esprit, et (2ème condition) ton prochain comme toi-même.

Nous pourrons donc distinguer 3 points :
- la décision
- notre relation à Dieu
- notre relation à l’autre.

a) Se déterminer à être saint:

« Maître, que dois-je faire pour avoir part à la vie éternelle ? »

L’une des 1ères exigences de la sainteté est de se poser cette question, d’avoir ce désir d’accéder à la vie éternelle, de vouloir être Saint.

Si vous ne le voulez pas, personne ne le pourra pour vous. Le Seigneur aura beau essayer de vous mettre à part pour Lui, si vous ne marchez pas, vous resterez assis à votre bureau de douane.
Un Père du désert disait:” S’il le voulait, un homme, d’un matin au soir, pourrait devenir Saint”.
C’est là que nous commençons à sentir à quel point c’est difficile. Parler de la sainteté en général, de loin, pour les autres, comme nous ce soir,..., c’est très bien, mais moi je ne vais pas mettre le petit doigt dans cet engrenage, parce que si je le mets, que va-t-il se passer ? J’y passerais tout entier ...
On ne peut pas entrer dans la Sainteté, sans y passer tout entier. Cela nous fait peur.

René : Il faut se souvenir de la prière de Jésus au Mont des Oliviers : « si ce calice pouvait s’éloigner de moi, mais que ta volonté soit faite ». J’ai longtemps prié avec ces mots, tellement conscient et angoissé que Jésus ne m’emmène « où je ne voudrais pas aller ».

Il faut se décider librement. La Sainteté est un choix, c’est le choix de Dieu sur nous, car c’est toujours Dieu qui a l’initiative, qui est la source de notre sainteté, c’est Lui qui nous appelle, mais c’est nous qui devons répondre.

Voyons les 2 moyens donnés dans le commandement d’amour et confirmés par Jésus.


b) Aimer Dieu de tout son coeur, de toute son âme, de tout son esprit :

Nous sentons dans ces 3 « tout » la radicalité de ce commandement, on retrouve bien ce sens d’appartenance totale à Dieu.
Alors, comment développer notre relation à Dieu ?

1) « Sanctuariser » notre vie :

Nous devons chercher à sanctifier les différents domaines de notre vie, j’ai même envie de dire de sanctuariser notre vie, faire de notre vie un sanctuaire où accueillir le Seigneur.

Sanctifier les lieux :

Nous avons vu que dans la Bible, certains lieux sont saints (Moïse devant le buisson ardent : « Enlèves tes sandales car le lieu que tu foules et saint »).
Quels lieux de notre vie pouvons-nous sanctifier ?
Commençons par respecter nous même les lieux saints, églises etc…
On peut aussi avoir chez soi un coin prière, endroit privilégié pour se mettre en présence du Seigneur. On ne posera pas l’icône sur la poubelle, on s’appliquera à embellir ce lieu.
Mettre une petite icône dans sa voiture, un crucifix dans son bureau.

Sanctifier notre corps :

« Votre corps est le temple de l’Esprit saint » (1Co 6,19).
Nous devons par conséquent respecter notre corps, en prendre soin.
Mettre notre corps, notre voix, nos gestes, … au service de la louange de Dieu.
En faire des objets dignes de notre nature sainte.

Sanctifier notre temps :

Dans la Genèse, Dieu bénit le 7ème jour et le sanctifie.
Faisons du dimanche un jour à part, saint, plus particulièrement donné à Dieu.
Rendons Dieu présent à différents moments de la journée, à la maison, en voiture, en cours ou au travail, nous sanctifions aussi notre temps.

Ayons le désir de faire de notre vie une vie consacrée. Ceci ne s’adresse pas qu’aux religieux. Nous sommes appelés à être « dans le monde sans être du monde » (Jean 17,16), à être à part avec le Seigneur. Nous devons devenir un sanctuaire dans le monde et pour le monde, sanctuaire dans lequel les autres rencontrerons Dieu.

2) Renoncer au péché :

Une autre exigence de sainteté, qui est vraiment une exigence de conversion, c’est de renoncer au péché. On ne peut pas servir deux maîtres. Ou on s’attachera à l’un et on se détournera de l’autre, ou on haïra l’un et on s’attachera à l’autre. (Nous sommes bien dans la perspective d’aimer Dieu de tout son cœur etc…)
C’est ce qui est demandé dans le Credo du Baptême. « Renoncez-vous au mal et à tout se qui conduit au mal ? ». C’est une exigence radicale et fondamentale, toujours à reprendre. Nous voudrions être Saint, mais en continuant à garder nos aises, nos petites attaches, avec nos faiblesses et nos mauvais penchants.
Nous nous rendons bien compte que le renoncement au péché que demande la sainteté, n’est pas quelque chose de facile ni d’agréable. Avec ce renoncement au péché qui est un des éléments fondamentaux de la sainteté, de déraciner en nous les mauvais penchants, il y a cet appel à renoncer à nous-mêmes.

“Si quelqu’un veut venir à ma suite, qu’il se renie lui-même “ dit Jésus (Luc 9 23-25).
“Si tu veux être parfait, va, vends tout ce que tu possèdes et donne-le au pauvre”...

Ce renoncement a un aspect négatif, mais le corrélatif positif est le don de nous-mêmes, c’est cela que le Seigneur nous demande. Le Seigneur nous demande de tout lui donner, et par conséquent de renoncer à ce qui n’est pas Lui. Ceci peut parfois se faire dans la douleur et les larmes, il n’y a pas de sainteté facile. Comme le dit le psaume : « Les épreuves du Juste sont nombreuses, mais de toutes, le Seigneur le délivre ».

René : il y a quelques années je me suis trouvé dans une situation d’objection de conscience dans mon activité professionnelle. Prendre position, dire non a été une démarche difficile et en même temps très féconde spirituellement. Puisque j’ai pu choisir réellement le camp de Jésus en acceptant de mettre ma carrière, mon travail en jeu.

3) Etre membre du Corps du Christ, l’Eglise

Et puis aimer mon Dieu c’est aimer, respecter et être fidèle à son Corps vivant qui est l’Eglise.
A y coopérer et travailler à ce qu’elle soit belle, sainte et missionnaire.
Croire en l’Eglise du Ciel et la communion des saints.


c) Aimer son Prochain comme soi-même :

Deuxième commandement pour la sainteté, aimer son prochain comme soi-même.
Reprenons la parabole.

Le prêtre et le lévite ne s’arrêtent pas. Pas le temps, pas envie, pas possible car toucher le sang rendait impur pour le prêtre, beaucoup de bonnes raisons de ne pas exercer la Charité, faire attention à l’autre.
A contrario, nous voyons l’amour désintéressé du Samaritain. Il prend le temps, lui donne sa monture, son argent, son attention.
Qui a été le prochain de cet homme blessé dans le fossé ? Ce samaritain qui a fait preuve de bonté. Jésus invite le docteur de la Loi à faire de même, exercer la charité envers son prochain.
Et moi, suis-je prêt à m’arrêter ?
Suis-je prêt à aimer tous mes prochains, ce samaritain, homme peu aimé et mal considéré à cette époque et qui vient néanmoins à mon secours ?

Nous recevons une invitation permanente à prendre le temps d’aimer notre prochain ;
Regardons Jésus dans les évangiles. Il prend toujours le temps nécessaire pour l’aveugle né de Jéricho, pour tous ces malades qui viennent à lui, pour ce docteur de la Loi, pour la femme adultère, la samaritaine, …
La vie de Jésus n’est-elle pas le meilleur exemple d’exercice de la charité, de la sainteté ?

Le père Chevrier, homme de terrain auprès des enfants des rues, écrit : « Notre union à Jésus-Christ doit être si intime, si visible, si parfaite que les hommes doivent dire en nous voyant : voilà un autre Jésus-Christ ! Nous devons reproduire à l’extérieur comme à l’intérieur, les vertus de JC, sa pauvreté, sa prière, sa charité. »
Et ne pensons pas qu’il nous faut des prédispositions extraordinaires :
« Seigneur, si vous avez besoin d’un pauvre, me voici ! Si vous avez besoin d’un fou, me voici ! Me voici, Ô Jésus, pour faire votre volonté : je suis à vous. »

Moi aussi, Jésus, ce soir, je veux t’appartenir.


d) Les obstacles à la sainteté


1) la crainte des souffrances :
Il y a comme premier obstacle, la crainte de ce que le Seigneur va nous demander, et en particulier la crainte de la souffrance. C’est un des obstacles les plus difficiles à surmonter, car nous voulons bien appartenir à Dieu complètement, Tout lui donner, nous sommes prêts à nous donner nous-mêmes, mais nous avons une très grande peur et une très grande angoisse de la souffrance et nous pressentons toujours que la Sainteté passe par la souffrance, par la croix.

L’obstacle de la souffrance est très réel et Jésus l’a vécu (repensons au jardin des Oliviers), mais nous le majorons par notre imaginaire et le démon s’en sert aussi beaucoup pour nous empêcher de devenir des saints, de nous donner complètement au Seigneur. Demandons au Seigneur de surmonter cette crainte de la souffrance, non pas que nous ne souffrirons pas, mais de nous délivrer de cette angoisse.

2) manque de désir et mauvaises habitudes :
Un des obstacles qui peut nous empêcher de devenir des saints, c’est le manque de désir, de ne pas avoir soif de cette eau vive. Il faut demander au Seigneur d’avoir soif. Il y a tous ces attachements, tous ces liens au péché. On a décidé de renoncer au péché, mais on découvre en nous-mêmes une loi, comme dit St Paul, qui nous entraîne, qui fait que nous ne faisons pas le bien que nous voudrions et nous faisons le mal que nous ne voudrions pas.

Je voudrais évoquer comme un obstacle latent, comme un lien, ces mauvaises habitudes, tous ces liens conscients ou inconscients qui nous empêchent de démarrer et d’avancer. Par exemple : l’homme qui était riche a décidé de suivre le Seigneur, de pratiquer la Loi dans toute sa beauté, qui est la Loi du Commandement, il a renoncé au péché, il est vraiment tourné vers Dieu, mais, voilà, c’est qu’il a de grands biens et même s’il n’en fait pas un usage malhonnête, etc... il y est attaché, cela fait partie de son univers et il n’arrive pas à s’en détacher.

Il peut y avoir en nous toutes sortes de petites manies, de mauvaises habitudes, qui sans être très graves en elles-mêmes, peuvent constituer des obstacles. La voie ici, c’est d’abord d’identifier ce qui nous retient dans l’ordre des attachements, des liens, cela peut être dans l’ordre des affections, des habitudes, des manies, de la coquetterie, des craintes .... Il faut demander au Seigneur de nous libérer, de trancher ces liens.

3) blessures du passé :
Un autre domaine qui nous empêche de courir sur la voie de la sainteté, en dehors des péchés et de ce qui peut être des liens, c’est aussi toutes nos blessures que nous traînons dans notre vie. Toutes ces blessures de l’enfance, les incompréhensions, les rejets, tout ce que l’on découvre petit à petit dans la vie spirituelle, ce sont des choses, qui nous rétractent, nous recroquevillent sur nous-mêmes, lorsque l’on est mis dans des circonstances nous rappellent quelque chose qui nous a blessé, qui a été pour nous une épreuve.

Cela empêche cette sorte de liberté, de paix intérieure, de connaissance de Dieu qui est le propre de la Sainteté. Et là, pour surmonter ces obstacles, le Seigneur nous donne largement et toujours plus la guérison intérieure, il faut la lui demander.

René : un frère de mon grand-père, mon Oncle Etienne, était un saint prêtre. Il est né en 1916 et son père est mort sur le front l’année suivante. Il nous confiait souffrir de ne pouvoir vraiment comprendre, goûter la paternité de Dieu, n’ayant jamais connu son père.


e) Les voies de la sainteté :


1) Être argile dans les mains du potier

J’espère que vous vous dites : “Mais alors s’il en est ainsi, qui donc peut devenir Saint ?” ou bien encore “S’il faut être fou, ou alors s’il faut de telles exigences pour la sainteté, comment allons-nous y arriver ?”
Tant que l’on n’a pas vu que la Sainteté était quelque chose d’impossible aux hommes, on ne peut pas y arriver. C’est ici qu’a lieu le grand tournant, mais on ne peut le comprendre que si l’on a suivi le processus. “Il est plus facile à un chameau de passer dans le trou d’une aiguille, qu’à un riche d’entrer dans le royaume de Dieu. “ La voie de la sainteté c’est d’être appauvri complètement de toutes ces petites richesses vraies ou fausses dont nous nous entourons.

Les disciples restaient interdits à l’excès, et ils se disaient les uns aux autres : “Et qui alors peut être sauvé ? Qui peut devenir Saint ? Fixant sur eux son regard Jésus dit ; “Pour les hommes c’est impossible, mais non pour Dieu, car tout est possible à Dieu” Marc 10, 25/27.

Ste Thérèse de l’Enfant Jésus dit ceci :”Je sens toujours la même confiance de devenir une grande sainte, car je ne compte pas sur mes mérites, n’en ayant aucun, mais j’espère en Celui qui est la Vertu, la Sainteté même. C’est lui seul, qui se contentant de mes faibles efforts, m’élève jusqu’à lui, et me couvrant de ses mérites infinis me fera Sainte”.

Ainsi nous découvrons que la Sainteté ce n’est plus notre affaire, c’est vraiment celle du Seigneur. Vous voyez, la Sainteté, c’est vraiment ce désir de se laisser saisir et transformer par le Seigneur, rester argile dans les mains du potier...


2) Le pain pour la route

Notre voie de sainteté, c’est de nous laisser saisir, enseigner et nourrir par Dieu.

La voie de la Sainteté, c’est alors :

La prière : Nous avons besoin de remplir notre réservoir d’amour auprès du Seigneur. Le Christ lui-même priait beaucoup.

La lecture de la Parole de Dieu : Pour approfondir notre connaissance de Dieu et nous laisser édifier par la personne de Jésus et des saints.

Les sacrements : lieu de présence de Dieu par excellence.
- l’Eucharistie : se nourrir du Christ mais aussi s’associer à son sacrifice et devenir temple de son Corps
- La miséricorde : dans le sacrement de réconciliation, recevoir la grâce pour ne pas retomber

Le Saint Curé d’Ars : “Tous ceux qui sont devenus saints ont fréquenté les sacrements et ont élevé leur âme à Dieu par la prière “.

La force de l’Esprit Saint, qui nous maintient dans la paix et la joie dans cet abandon à Dieu. L’accueil de l’Esprit Saint et de ses dons, comme compagnon et guide sur la route de la sainteté.




CONCLUSION

Je vais vous dire une parole du Curé d’ Ars qui va vous faire plaisir :” Tous les Saints ne sont pas Saints de la même manière, il y a des Saints qui n’auraient pas pu vivre avec d’autres Saints..... tous ne prennent pas le même chemin, cependant tous arrivent au même endroit.

Nous ne sommes pas invités au départ à un exercice de perfection morale.
En vivant selon notre dignité d’homme et de baptisé, en répondant à l’appel de Jésus, avec sa grâce et sa miséricorde, nous rentrons dans son plan d’amour, dans sa Charité.

Faisons confiance au Seigneur qui nous guide, qui nous soutient et qui nous sauve, nous faisant accéder à la communion de saints. La sainteté se vit au présent comme la rencontre avec le Seigneur, n’attendons pas demain pour répondre à l’appel et prendre le chemin des Béatitudes.

Heureux les cœurs purs, ils verront Dieu.

Les Saints n’ont pas tous bien commencé, mais ils ont tous bien fini.